La voie du shinobi
En 1988, j’étais au collège en classe de 4ème. Après les cours, j’avais l’habitude, avant de prendre le bus, de passer à la salle de jeu (c’est comme ça qu’on appelait la salle d’arcade). En effet, j’avais un peu de temps car lorsque je quittais à 15h30, le bus était à 16h10, et lorsque je quittais à 16h30, le bus était à 17h30. Le fossé technologique était énorme par rapport à nos micros ou consoles 8 bits de l’époque et lorsqu’on rentrait dans une salle d’arcade, on nageait en plein rêve, au milieu des nuages…enfin de la fumée de cigarette plutôt; ça faisait partie de l’ambiance. Graphisme, couleurs, sprites, animation, musique et son : tout était bien au-dessus de ce que j’avais sur mon Amstrad CPC.

Apprenti ninja
Parmi toutes ces bornes, il y avait certains jeux que j’admirais par-dessus tout et deux de ces jeux étaient Double Dragon et Shinobi. Ces 2 jeux sont encore aujourd’hui, selon moi, deux références incontestables qui ont posé des standards. Des niveaux à parcourir, des pièges, des objets à récupérer, à utiliser et des boss de fin de niveau. C’était certes un format court, arcade oblige, mais ces point clés demeurent encore dans les jeux actuels. J’ai passé des heures à regarder les gens jouer à Shinobi. Je connaissais les niveaux par cœur, enfin j’avais l’impression de les connaître car regarder était une chose, mais jouer était une autre paire de manche. Je regardais souvent un mec de ma classe y jouer, c’était une bête à ce jeu, il passait les niveaux sans trop de difficultés, même le niveau avec les rondins du boss samouraï pour ceux qui connaissent. Une fois, il devait partir prendre son bus et il m’a laissé la partie, justement dans ce niveau. J’ai bouffé 3 vies en moins d’une minute. Comme j’étais nul en fait… Je n’avais pas pour habitude de jouer à la salle de jeu, je n’avais pas d’argent de poche, enfin pas assez, tout ce que j’avais mensuellement passait dans l’achat de mon magazine Joystick, c’était sacré pour moi.
Histoire à la noix
Chez moi, je retrouvais certains de ces jeux d’arcade sur mon CPC 6128. Croyez-moi, même si les graphismes étaient loin des versions arcade, je retrouvais les sensations et l’imagination faisait le reste. On avait l’arcade à la maison ! (enfin c’est ce qu’on se disait). Ainsi, j’ai passé beaucoup de temps sur des Tiger Road, Black Tiger, Rygar… mais il y avait un jeu que je désirais par-dessus tout, c’était Shinobi. J’en ai longtemps rêvé, et plus d’un an plus tard, Virgin Mastertronic l’a fait. C’était un soir, en septembre 1989 (je me souviens, c’était la période où ma mère ramassait des noix chez moi, je détestais ça). En passant à la librairie, en descendant des marches au milieu du magasin, derrière une vitrine il y avait les jeux Amstrad, et là j’aperçus le Graal ! Deux exemplaires de Shinobi. Il me le fallait. Merci maman, car en rentrant, j’ai pu négocier le jeu contre le ramassage de plusieurs dizaines de kg de noix : le jeu coûtait 149 Francs, je m’en souviens encore.
Musashi 6128
Pour moi, et je le pense encore aujourd’hui, la conversion du jeu sur le CPC était excellente. On y retrouvait les niveaux d’origine, les boss et les mêmes musiques que la version arcade. Seul manquait le boss final du jeu ,mais ce n’était pas grave, car atteindre le dernier niveau était chose assez difficile. Qu’est-ce que j’ai pu lancer la disquette pour y jouer et le jeu fonctionne toujours aujourd’hui; je l’ai encore (avec boite et notice) dans ma collection CPC. Pour l’anecdote, au magasin il y avait deux exemplaires du jeu et il en restait un après avoir pris le mien. Le lendemain quand je suis repassé, il n’y en avait plus. Quel succès ! Une semaine plus tard, mes parents avaient invité des amis à manger et ils étaient venus avec leur fils qui avait aussi un CPC. Il m’annonça fièrement : « j’ai Shinobi ». C’était donc lui qui avait acheté le second exemplaire…On a forcément passé la soirée à y jouer.